Tisserands, tisseurs, fileuses et mulquiniers

Dans notre généalogie, beaucoup de nos ancêtres étaient tisseurs ou tisserands, surtout de la fin du 17e au 18e siècle. Les Collet à Neuville St Amand, Les Tricot, les Monfourny à Maissemy, les Poëtte à St Quentin, les Télotte à Lehaucourt et puis beaucoup d'autres amis, parents que l'on retrouve comme témoins dans plusieurs actes. C'était essentiellement un métier d'hommes, au moins pour ceux qui nous concernent, en complément, les femmes étaient fileuses.
Uranie Venet est née le 8 juillet 1832
Telle l'arrière grand mère de notre grand père, Pépère Nono, Roger Pèlerin (1901-1990) que nous connaissons par cette merveilleuse photo qui est parvenue jusqu'à nous. Uranie Venet est née le 8 juillet 1832, je ne connais pas la date de son décès mais je sais qu'elle est inhumée à Montigny en Arrouaise, qui à l'époque s'appelait Montigny- Carotte.
Si nos anciens sont passés de la charrue au métier à tisser, c'est à cause de Philippe II*, roi très catholique d'Espagne, voire un peu fanatique, qui a tant fait voir aux protestants hollandais que ceux-ci s'expatrient avec leur savoir faire en matière de toile fine en lin et de belles étoffes en laine. Parmi eux, Armand Crommelin, industriel, s'installa à Saint-Quentin, il contribua si bien à la fortune de la ville qu'une place porte encore son nom, celle que l'on appelle encore la place des quatre colonnes, au croisement du boulevard Richelieu, de la rue du Cateau et de la rue de Cambrai. Mais, dans ce domaine, il y a une autre profession qui m'a bien intrigué quand je l'ai découverte dans les actes de nos ancêtres, c'est celle de "mulquinier". Il a fallu un jour que papa me trouve un article de l'Aisne Nouvelle pour résoudre cette énigme, il n'y avait pas Internet à l'époque. Voici l'article que je reprends tel quel et qui a du paraître, il y a une vingtaine d'années.
Philippe II, roi d'Espagne, (1527-1588)

Les mulquiniers

Le mot est disparu avec les tisserands du Cambrésis, du Hainaut et du Vermandois. On disait: Molquinier, Marquenier, Murquenier. Le terme vient sans doute du mot Molequin qui servait à désigner une étoffe précieuse de Lin, genre mousseline. En principe, il s'agissait du fabricant, mais, en réalité, il finit par s'appliquer à tous les tisseurs. La charte des mulquiniers de Valenciennes en 1413 fait mention de Molekiniers, et celle de 1474 de Meulequinerie. A cette époque, l'ouvrier qui ourdissait et dévidait le fil était un Molequin. Dans sa notice historique de Nauroy, le pasteur Pannier écrit : " ... Tous ces braves gens, Mulquiniers et fileuses étaient venus au nombre d'une quarantaine au siège du Saillage (de Saint-Quentin) ".
La mulquinerie ou tissage des toiles de Lin a été établie à Saint-Quentin vers 1570 par l'immigration d'ouvriers protestants chassés des Pays Bas par le Duc D'albe Fernando-AlVary de Tolède, né en 1508. Général espagnol au service de Philippe Il d'Espagne, il fut gouverneur des Pays-Bas de 1567 à 1572. Il est surtout connu pour sa répression impitoyable de "la révolte des gueux" dans ce que nous désignons sous le nom de Hollande.
M. Dolez nous dit que cette industrie existait déjà à Saint-Quentin depuis longtemps, mais Crommelin lui donne un nouvel essor vers 1582 en faisant de gros efforts pour propager la culture du Lin dans le Vermandois. En 1775, il y avait dans le Vermandois 5 600 Mulquiniers, dont 56 à Saint-Quentin avec 180 métiers battants. Pour les servir, on ne comptait pas moins de 33 800 personnes, surtout des fileuses (1), mais aussi des ourdisseuses, des dévideuses et des tieurs, qui étaient la plus part du temps des enfants en bas âge.
En 1815 il y avait à Origny-Sainte-Benoîte, Thenelles et Neuvillette une classe d'ouvriers occupés de père en fils à tisser de grosses toiles claires de 3/4 et 4/4.Dans le Lamandois, tous les quinze jours, le mulquinier vient vendre sa toile à Saint-Quentin (à pied) et son travail de 15 jours lui est payé de 20 à 25 francs. M. Gayet nous dit que l'ensemble de cette corporation, à la ville comme à la campagne, connaît une extrême pauvreté.
Recueilli par Paul Moniot(1).Les fileurs et fileuses, spécialisés dans le lin étaient désignés sous le nom de Filandriers et Filandrières. (Article de l'Aisne Nouvelle - Le passé simple - date inconnue)
Un site qui parle des mulquiniers du village de Quievy dans le Nord, arrondissement de Cambrai
http://perso.orange.fr/geneadavoine/les_mulquiniers.htm
Ancien bâtiment de La Cotonnière rue Mulhouse à Saint-Quentin(02)
Dans notre généalogie, il y a avait au moins 4 Poisot de Brancourt-le-Grand qui étaient mulquiniers et des Graux à Bernot. Après la Révolution, il semble que nos ancêtres soient retournés au travail de la terre, comme valets de charrue ou dans les usines comme manouvriers, à part quelques exceptions, ...les Saget étaient blanchisseurs, les Gallier, bourreliers, et puis bien sûr les Collet, ébénistes, ainsi que notre grand-père Charles. En fait, peu des nôtres retourneront dans l'industrie textile pourtant florissante dans la première moitié du 20e siècle. Mais dans notre histoire récente, plusieurs de la famille, souvent les femmes, ont travaillé dans les usines textiles. Marie Francine Pèlerin épouse Legrand, Jacqueline Riquet épouse Pèlerin, Saget Alexandre ont travaillé à La Cotonnière, rue de Mulhouse, et d'autres sûrement.
La Place Crommelin à St Quentin
Voilà la place Cromellin avec le café des quatre colonnes, juste après la guerre et ci-dessous, un peu plus tard au moment de la renaissance de la ville. Le café des 4 colonnes existe toujours, il y a maintenant un rond point. Il y a toujours eu beaucoup de circulation. Je l'ai pris tous les jours de 1974 jusqu'en 1981 pour aller de Remicourt à l'hôpital, il y avait des feux rouges, mais ça bouchonnait régulièrement. J'y ai vu quelques carambolages.
La Place Crommelin à St Quentin
* Philippe II n'a pas fait souffrir que les protestants et la ville de Saint Quentin lui doit un de ses épisodes les plus tragiques : le siège de 1557, immortalisé par le monument qui siège maintenant place du huit octobre. Ce monument imposant, ce qu'il commémore surtout, mériterait à lui seul quelques pages, mais je n'ai pas encore d'éléments sur l'implication de nos ancêtres dans cet événement mais vu son importance il ne peut pas en être autrement.

Pour servir à l'histoire familiale - Jalons AP - Février 2007
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