L’hiver s’en est allé, le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il n’a pas été méchant par chez nous, il n’y a pas eu trop d’eau, je crains que les réserves ne soient pas suffisantes si le printemps suit le même chemin. Il n’y a pas eu pour le jardinier de grandes périodes où le travail au jardin soit impossible pour raisons d’intempéries, gel ou terrain détrempé, en fait pas de trêve hivernale si bien que j’ai pris un peu d’avance sur le programme, il y a déjà eu de belles journées où on commence en parka et on finit en débardeur. La végétation est quand même freinée par les matinées fraîches avec parfois de petites gelées, mais rien de bien méchant jusqu’à présent. Les arbres fruitiers sont bien fleuris, poiriers, pommiers, cerisiers, mirabelliers, c’est la promesse de belles récoltes pourvu qu’on échappe au gel tardif, au vent violent ou à la grêle. Sinon, je ne sais pas ce que cela signifie, mais par ici, il y a profusion de pissenlits, par endroits de véritables tapis jaune, la pelouse en est clairsemée mais les parcelles potagères sont à peu près épargnées, bon, ce n’est pas dramatique, d’abord c’est joli et les poules aiment bien et les gâteaux que l’on fait avec leurs œufs sont d’un jaune soutenu.
L’année dernière, à cette époque nous sortions d’un épisode neigeux important, aujourd’hui on se serait presque cru au printemps, il faisait même chaud en plein après-midi au soleil, nous avions pourtant eu -2°C ce matin au réveil. En regardant les prévisions météorologiques, on pourrait même croire que l’hiver est fini. Les températures les plus basses relevées jusqu’à maintenant depuis novembre au jardin ne descendent pas en dessous de -5°C. D’ailleurs, j’ai retrouvé dans mes parcelles des putrelles (mercuriale annuelle pour les botanistes) qui ont passé l’hiver jusqu’à présent et qui sont en pleine forme alors que d’habitude on en est débarrassé au premier grand gel, de même pour la phacélie que j’utilise en engrais vert, tout devrait être fondu depuis longtemps et bien non, mais ça ce n’est pas trop grave. Bien sûr les surprises du genre fortes gelées tardives ne sont pas à exclure, ça va être un sujet d’inquiétude pour le jardinier pour les semaines à venir. En attendant, j’ai commencé à planter les ails, je vais mettre les échalotes et les oignons dans la foulée, j’ai fait mes premiers semis de petits pois et de poireaux et au chaud de salades, de choux et des premières tomates.
En effet, ce mois s’annonce sans trop de gelées et avec des précipitations limitées, tant mieux pour les factures de chauffage mais pour le jardinier ce n’est pas forcément une bonne nouvelle. Le risque c’est que dès la fin du mois la douceur relative entraîne un départ de la végétation qui sera très sensible aux éventuelles gelées du mois de février qui peuvent être sévères et compromettre les récoltes de fruits et la floraison des arbustes d’ornement. N’empêche je ne boude pas mon plaisir de voir les jours s’allonger et de pouvoir retourner au jardin, surtout quand il y a un petit rayon de soleil. Les premiers semis vont pouvoir se faire, je vais commencer par des fèves dès maintenant, c’est une première pour moi, si le résultat est probant, aussi bien au jardin qu’en cuisine, ça pourrait devenir un incontournable. Apparemment ça pousse bien, ce n’est pas sujet aux maladies ni aux ravageurs et ça n’épuise pas trop la terre, au contraire les racines fixent l’azote dans le sol. Et puis après je vais commencer à préparer les planches pour les pommes de terre, les ails, oignons et échalotes, ça y est c’est parti !
Je doute que les dictons populaires résistent au réchauffement climatique... Je relisais dans une revue un ancien article sur le faucon pèlerin et sur l’extinction à laquelle il a à faire face, en fait son problème c’est qu’il est au sommet d’une pyramide qui démarre avec des vers de terre qui accumulent dans leurs graisses tous les pesticides, herbicides et compagnie qui transitent dans leur système digestif. Ensuite, ce sont les oiseaux qui bouffent les vers et qui eux aussi n’étant pas programmés pour éliminer les poisons les stockent à leur tour, malades ils sont des proies faciles pour le faucon pèlerin. Il n’en profite pas à moyen terme, ses œufs deviennent plus fragiles, son comportement est altéré et le renouvellement des populations ne se fait plus. Je vous dis ça parce que nous aussi nous sommes au sommet d’une pyramide, vous mettez de la luzerne et des granulés à la place des vers, des vaches à la place des oiseaux vous devinez facilement la suite. Ce n’est pas la peine d’opposer la fin du mois avec la fin du monde, elles finiront bien par se confondre. Bonnes fêtes.
La pluie est enfin revenue avec les premières fraîcheurs et même les premières gelées, au revoir dahlias, à l ‘année prochaine. En quelques jours la structure de la terre s’est complètement modifiée, son aspect de cendre grise s’est transformée en humus noir gorgé d’eau. Finies, les corvées d’arrosage, il faut maintenant préparer le jardin à l’hiver, démonter les rames des haricots, les tuteurs des dahlias, ramasser les feuilles mortes pour ensuite les épandre sur les parcelles dénudées. Je vais compléter par un apport de compost pour les parcelles qui devront recevoir au printemps les plantes gourmandes. Va débuter aussi une période où certains travaux structurels vont pouvoir se faire, reprendre certaines bordures, les clôtures et surtout je vais installer un écran anti-racines sur une parcelle qui borde au nord le bois voisin, en effet les apports d’engrais verts et l’arrosage attirent les racines en particulier des peupliers et des frênes. Leur présence se manifeste par le manque de vigueur des légumes installés. Il faut surtout ne pas y installer de vivaces. Le travail régulier de la terre permet d’éviter que ces racines prennent trop leur aise.